lundi 17 septembre 2012

Ironman: Premier chapitre

- " Est-ce que les lunettes te font bien? Est-ce que tu as de l'eau dans tes yeux?" me demande Isabelle.

- " C'est super et je n'ai pas d'eau dans les yeux!" lui répondis-je.

- " C'est parce que tu nages la tête complètement sortie de l'eau!!!'' me répond t-elle en riant.

C'était en juillet 2010, alors que mon amie Isabelle m'avait invité à se joindre à leur groupe de triathlètes à Lake Placid à quelques semaines de l'Ironman auquel Isabelle allait participer. Je faisais du vélo depuis 3 ans et je venais de débuter la course à pied avec un demi-marathon, en route vers mon premier marathon 2 mois plus tard.

Comme je commençais à alterner régulièrement les entraînements de vélo et de course à pied cet été-là, je trouvais intéressant l'idée de les combiner dans le cadre d'un triathlon. Je réalisais en fait que j'arrivais à mes courses à pied les jambes déjà fatiguées car j'avais souvent fait du vélo la veille. Je me disais que tant qu'à toujours être désavantagé par rapport aux purs coureurs qui ne faisaient pas de vélo, j'étais aussi bien de faire du triathlon et d'avoir les jambes fatiguées comme tout le monde lorsque j'arrivais à la course à pied! Il me restait seulement à apprendre à nager...

Je me souviendrai toujours des premiers entraînements avec mon club de triathlon Les Chickens quelques mois plus tard où après 30 minutes de natation j'avais besoin d'un gel pour poursuivre l'entraînement et ma difficulté à compléter des tests de 400 mètres consécutifs!

J'ai persévéré en natation, j'ai même pris goût à nager tôt le matin avant d'aller travailler et avant même mon premier triathlon à vie, j'étais déjà inscrit à un demi-Ironman à la fin de l'année, dans le but avoué de m'inscrire au Ironman de Lake Placid l'année suivante. Heureusement, j'ai eu par la suite un gros coup de coeur lors de mes deux premiers triathlons à vie, soit celui lors d'un camp d'entraînement à Cuba où nous longeions la mer sur notre vélo et lors de mon premier triathlon officiel à Mont-Tremblant!

Je m'enlignais donc pour le Ironman de Lake Placid lorsque la rumeur s'est confirmée: un Ironman aurait lieu pour la première fois au Québec le 19 août 2012. Après quelques jours de réflexion, j'ai décidé de plutôt m'inscrire à celui-ci pour vivre ce moment historique et pour permettre à ma famille de pouvoir plus facilement venir m'encourager lors de cette journée.

J'ai finalement complété ma première saison de triathlon avec 3 triathlons sprint, un triathlon olympique et un demi-Ironman. Après ma saison de ski de fond, j'ai décidé de mettre l'emphase sur la course à pied au printemps avec mes 2 mois de préparation pour le marathon de Boston, ensuite de me concentrer davantage pour les 2 mois suivants sur le vélo avec entre autres un camp d'entraînement avec Julie en Virginie et pour les 2 derniers mois, de mélanger le tout en mettant l'emphase à courir les jambes lourdes/fatiguées (le meilleur conseil qu'on m'a donné pour un marathon ou triathlon!), en augmentant le volume sur le vélo et en nageant dans des lacs avec mon Wetsuit (le meilleur ami du triathlète!).

Ma semaine typique ressemblait à ceci pour les mois de juin et juillet:

Lundi: Repos
Mardi: 1h de natation le matin par intervalles au Stade (2 000 à 2 500 mètres, merci Rose!) et après le travail, 1h de course à pied tempo suivi d'un entraînement par intervalles de 60 à 90 minutes avec mon club de triathlon (merci à Steeve mon lapin!) au Parc Maisonneuve (total de 2h à 2h30 de course à pied avec moyenne de 30km)
Mercredi soir: Sortie hyper tempo d'environ 3h de vélo avec mon club CCCP (merci à Marc-André et au groupe 4 pour m'avoir obligé à pousser aussi fort sur mon vélo pour essayer de vous suivre!!!) et course à pied de 15 minutes (brick)
Jeudi: 1h de natation le matin, optionnel le soir (1h de course à pied ou 2h de vélo)
Vendredi: Repos ou optionnel de course à pied ou de vélo selon le jeudi soir, nage avec Wetsuit dans un lac parfois (1h)
Samedi: Longue sortie de vélo de 4h avec course à pied de 30 minutes par la suite (brick)
Dimanche: Longue course à pied entre 1h30 et 2h30

En général, après 2 semaines de 12h à 15h d'entraînement, j'enchaînais avec une troisième semaine autour de 18h semaine (souvent avec une compétition à la fin) avant de diminuer autour de 10h semaine pour la quatrième semaine et ensuite débuter un nouveau cycle.

Après avoir terminé ce programme à la mi-juillet avec un demi-Ironman (premier podium à vie!), une cyclosportive de 180km la semaine suivante et une première nage en eau libre de 3,8 km quelques jours plus tard, à 1 mois du Ironman, je me sentais prêt pour mon Ironman...avec un peu de repos à prendre! J'ai fait du maintien seulement pour le dernier mois (merci au groupe de Wally du Maine pour la motivation en groupe!).

Ma dernière semaine avant le Ironman, j'ai pris presque complètement off et j'ai travaillé mon mental pour être prêt à toutes éventualités, particulièrement au cas où il pleuvrait pendant le vélo ou que j'aurais une crevaison. J'ai également finalisé ma stratégie de nutrition/alimentation que j'avais déjà eu l'occasion de tester lors de compétitions précédentes.

Tout était maintenant en place pour un départ le vendredi midi pour Tremblant et la météo s'annonçait en plus parfaite pour le dimanche!

En arrivant sur le site du Ironman à Tremblant le vendredi, je suis déjà impressionné lorsque je vais récupérer mon dossard et mes sacs. On s'occupe de nous aux p'tits soins, comme si nous étions des VIP. Ce fut le même sentiment tout au cours du week-end, incluant pendant l'Ironman. Si j'avais des craintes au départ sur l'organisation pour une première édition, celles-ci étaient en train de se dissiper rapidement.





Après le banquet des athlètes du vendredi soir et le dépôt du vélo et des sacs le samedi, il ne reste plus qu'à espérer dormir qq heures avant que le réveil ne sonne à 5h du matin.



Jour J!

4h45: J'ouvre les yeux un peu avant mon réveil-matin, j'ai assez bien dormi et je profite des 15 minutes restantes pour me rappeler mon parcours pour me rendre ici. J'ai toujours dit que je souhaitais avoir du fun dans ce chemin, peu importe le résultat lors de l'Ironman. Je me suis rappelé mes débuts difficiles à la natation et mes premières tentatives de vélo de route où j'avais tellement de difficulté à clipper mes souliers que j'avais fait mon premier entraînement avec mon club CCCP avec mon vélo hybride! J'ai également visualisé ma course, la divisant en plusieurs sections pour chaque discipline, me voyant de façon positive sur chaque segment.

5h: Bien réveillé et d'attaque pour cette longue journée (!), j'ai réveillé Julie, on a mangé rapidement (1 gros gruau, 2 oeufs, un muffin, jus de pommes, lait et yaourt pour moi) et on a quitté pour la marche de 10 minutes jusqu'au site.

6h20: La zone de transition ferme et je me déplace vers le départ sur la plage pour 7h. J'ai croisé en chemin un autre Philippe avec lesquel j'ai étudié à l'université (je n'étais pas sportif à l'époque et celui-ci courait le Mont Orford pendant que je montais celui-ci en jeans!), Benoît que j'ai prévu battre pour prendre ma revenge du demi-Ironman de l'an dernier et les autres Chickens qui feront la course (Seb, Alex (Coin Coin), Phil le pirate, George et Hélène). Je réalise en mettant mon Wetsuit que j'ai oublié de laisser mes lunettes de soleil avec mon sac de vélo...Julie essaiera de me les donner lorsque je sortirai de l'eau. Au moins elles ne sont pas oubliées à notre condo. Je me suis dit que je n'aurais que des pensées positives au cours de cette journée et j'applique déjà cette philosophie, sachant également que tout ne peut aller comme prévu dans un Ironman.

Merci à la mère de Phil le pirate pour le repère qui a guidé tous mes supporteurs!


Test ultime sous le regard approbateur de Julie...avec mes lunettes de soleil sur la tête!


6h55: Je me dirige vers le départ et je retrouve Phil le pirate et Hélène à l'endroit où nous avions prévu prendre le départ, à gauche complètement, pour ne pas trop se faire brasser! Nous sommes tous des nageurs très ordinaires et personnellement, mon plus grand stress de la journée est le départ de masse avec 2 499 autres nageurs! Je suis quand même super heureux d'être là et j'ai le sourire facile.

7h: Le départ est donné!!! Je lâche un cri de joie, cours dans l'eau...et plonge!

Je suis quelque part à gauche!


Les premières minutes sont un peu cacophoniques comme dans n'importe quel triathlon où chacun cherche sa place. Les nageurs trouvent rapidement leur place et sans m'en rendre compte (probablement car je nage un peu croche!) je me retrouve en plein milieu du peloton! Ce n'était pas ma stratégie mais je réalise que je suis dans un bon endroit, profitant de l'effet de vague et personne ne me brasse. Je nage ainsi pour probablement 30 minutes consécutives. Je suis surpris de pouvoir avancer aussi facilement dans cette mer humaine et je me fais la réflexion que c'est vraiment moins pire qu'on m'avait mentionné la natation dans un Ironman.

Sur le retour, je m'éloigne un peu du centre involontairement et je me retrouve davantage brassé par les vagues lorsque je nage sur les côtés. Je retourne vers le centre et je suis surpris d'être complètement à droite tout à coup, exactement sur la ligne des bouées. Je garde cette ligne, toujours surpris de ne pas me faire grimper dessus ou tirer les jambes comme je l'anticipais et lorsque j'apperçois un tronc d'arbre dans le fond de l'eau, je sais que la plage approche! Mon épaule droite commence à être en compote mais pour l'avoir déjà soumis à 8h de ski de fond dans la même journée, je n'ai pas de pitié pour elle et je continue de me servir presque exclusivement de mes bras pour cette natation. Je nage le plus longtemps possible et je me lève pour appercevoir l'heure qui s'affiche: 8h16!!! Je lâche un cri de joie et lève les bras en l'air. Je visais 1h20 et je sais qu'à 1h16, c'est ma vitesse la plus rapide dans un triathlon!!!

J'avais demandé des pancartes humoristiques à mes supporteurs!


Je sors de l'eau et je suis très surpris de voir autant de supporteurs! On m'enlève mon Wetsuit, je dépasse au moins 50 nageurs en courant les 300 mètres nous reliant à la zone de transition et je vois plusieurs de mes fans, dont Julie qui me tend mes lunettes! Ouf!

8h20: J'entre dans les tentes de transition. On récupère notre sac de vélo dans la première et on s'asseoit sur une chaise dans la deuxième pour mettre nos trucs de vélo. L'ambiance est super le fun et on sent que beaucoup de triathlètes sont heureux que la natation soit terminée (c'est souvent la discipline la plus faible chez les triathlètes, surtout chez les gars). Je ne me presse pas trop pour être certain d'être OK pour les 180km de vélo qui m'attendent!

8h30: Je sors de la tente, un bénévole me donne mon vélo et j'embarque pour 2 boucles de 90km. Une foule impressionnante, me rappelant le marathon de Boston, nous salue lors de notre sortie. J'ai tellement réussi à nager relax et constant que je n'ai pas l'impression d'avoir nagé; mes jambes sont super bonnes et je ne fais que dépasser pendant les 15 premiers kilomètres, gardant la voie de gauche tout le long. Je vais à un bon rythme mais sans vraiment pousser alors je suis surpris de dépasser autant de gens. Un premier cycliste me dépasse finalement après 15km et un peu plus tard, dépassant d'autres cyclistes, j'entends un ''Allez, donne-lui la claque!''. C'est l'autre Phil avec lequel j'ai étudié. On échange quelques paroles et on jouera au chat et à la souris pendant plusieurs kilomètres, tout comme avec Coin Coin qui me rattrape, et tous deux finissent par s'échapper.

Je roule au feeling, sans trop regarder mon odomètre mais en m'assurant de ne pas me brûler, et je respecte ma stratégie à vélo: un gel et une capsule de sel à toutes les heures, des bouchées de bar Cliff régulièrement et au moins une bouteille de Perform (vraiment mauvais!!!) à toutes les heures avec un peu d'eau pour changer le goût (les ravitaillements sont aux 15km). Je regarde pour la première fois mon odomètre après les 30 premiers kilomètres: 50 minutes et moyenne de 35km/h! Wow! Je suis content car j'ai comme objectif de faire entre 5h30 et 5h45 sur mon vélo, soit autour de 31 à 32km/h. Le retour sur la 117 se passe aussi bien et avec l'asphalte refaite et l'absence de voiture, je comprends pour la première fois pourquoi ils ont choisi la 117 comme parcours du Ironman: c'est très beau. La courte boucle dans St-Jovite est agréable pour voir les supporteurs dans la ville, et ce malgré une asphalte en moins bon état. De retour sur la Montée Ryan et après être passé devant le spa avec un client qui se fait masser sur une chaise juste à côté de nous (!),  je suis fébrile à l'idée de voir mes supporteurs près du P2, juste avant d'attaquer ma partie préférée du vélo; les fameuses côtes du Chemin Duplesssis!



On arrive très vite de la Montée Ryan, on roule à plus de 40km/h, et j'ai juste le temps d'apercevoir quelques visages connus des Chickens, ma blonde, famille/belle-famille et amis que je salue d'un signe de main. J'ai du gros fun dans les côtes du Chemin Duplessis, je joue au chat et à la souris avec les cyclistes de gros gabarit qui me dépassent dans les descentes et que je dépasse dans les montées (l'histoire de ma vie à vélo!), et je repasse devant les supporteurs en complétant la première boucle de 90km. Je consulte mon odomètre pour la 2e fois: 2h40, moyenne de 33km/h. Super! Je suis dans la bonne voie pour atteindre mon objectif! J'entame la 2e boucle gonflé à bloc.

Sur mon vélo en compagnie de mes supers bas de compression!


Dans la montée Ryan, exactement au 100e kilomètres, je ressens pour la première fois une légère baisse d'énergie, en même temps que le soleil qui commence à sortir davantage. Je dézippe un peu ma camisole et prend un gel d'urgence. Je garde le moral mais je constate que ça devient un peu plus difficile, avec le soleil et un bon vent sur la 117 (ma vitesse dans la plus grosse côte passe de 72km/h au premier tour à 65km/h en raison du vent). Je me permet une pause pour mon premier arrêt pipi de la journée. Un bénévole tient mon vélo pendant que je suis dans la toilette chimique bleue, m'étirant les jambes tout en pissant! Je suis content de voir que je ne n'ai pas encore les jambes lourdes et ça me redonne de l'énergie.

N'empêche, les 30km suivants ont été les difficiles mentalement.  Je me fais dépasser par un nombre élevé de cyclistes, et assez facilement en plus! J'ai l'impression de ne plus avancer mais je ne vais pourtant pas beaucoup plus lentement que lors de ma première boucle, compte tenu du vent. Je me dis en même temps que je ne m'attendais pas à ce que ce soit facile un Ironman et je me force à rester zen, sachant que de pousser présentement ne ferait que me brûler et me disant que j'allais prendre ma revenge dans les côtes de Duplessis. J'essaie de manger plus pour avoir un peu plus d'énergie mais je suis tanné du goût des Cliff Bar, je n'ai pas vraiment faim et je sens que j'aurai envie de vomir si je me force trop à manger. Je n'ai alors mangé que 2 Cliff Bar et j'avais calculé que je devais en manger au minimum 3 sur mon vélo pour ne pas manquer d'énergie sur la course à pied. Too bad, je me démerderai à la course à pied. Ce fut ma seule erreur de la journée, mais ce fut une énorme erreur.

Tel qu'anticipé, mes jambes de grimpeur vont encore très bien dans les côtes de Duplessis mais l'ambiance est vraiment différente au 2e tour. Personne ne parle, le soleil tape plus fort et on sent la souffrance après 5h de vélo. Même si je grimpe bien, je vois sur mon odomètre des 9km/h dans les montées, alors que je monte habituellement ces côtes à 12km/h. Je suis quand même satisfait de mon vélo, même si je sais que le deuxième tour fut plus lent. Je lâche un cri de joie une fois la dernière côte franchie. Résultat: 2h40 ma première boucle et 3h02 ma deuxième boucle pour un total de 5h42 et 31km/h de moyenne. Je sais que je dois oublier mon objectif ambitieux de 10h30 pour cet Ironman mais mon objectif plus réaliste était de le faire sous les 11h et c'est encore fort possible.

14h: J'entre dans les tentes blanches et Kevin, un Chicken dont je ne savais pas qu'il prenait part au Ironman arrive en même temps que moi et repart rapidement sur la course à pied après quelques échanges. Je le suis à mon tour, hyper heureux d'aller entamer la partie du marathon! J'ai l'impression d'être le triathlète qui a le plus hâte à cette partie!!! J'ai basé le plus gros de mon entraînement à me pratiquer à courir les jambes lourdes, j'adore les défis qu'offre un marathon et j'ai mes 2 derniers marathons à venger (3 crampes à Montréal et mur de Berlin lors du marathon de Boston!).

Et wow...je commence à courir et au lieu d'avoir les jambes comme des 2 x 4 comme c'est généralement le cas pendant les 10 premiers kilomètres, j'ai les jambes en grande forme! Je suis heureux et je me dis que c'est la preuve que j'étais bien reposé et que je n'ai pas trop poussé sur mon vélo.

14h10: Je sors de la zone de transition, gros sourire au visage pour entamer le marathon! Ma stratégie pour le marathon est d'y aller très relax pour les premiers 10km, de courir à 5 minutes le kilomètre pour les 20 suivants et de tout donner ce qu'il me reste sur les 12 derniers, en visant entre 3h30 et 3h45.

Mes supporteurs sont presque tous réunis à ma suggestion dans les côtes du début du parcours et ils m'encouragent bruyamment lors de mon passage, tout comme les Chickens à leur station d'aide un peu plus loin. Je suis tellement heureux de courir que je dois me forcer à ne pas pousser et c'est une véritable partie de plaisir le premier 10km. Je croise en chemin Coin Coin qui me tape dans la main en me criant: ''T'es plus fort que moi à la course, allez, viens me chercher''. Je lui réponds très confiant que ce sera le cas, lentement mais sûrement. Benoît me met de son côté au défi d'aller le chercher et l'autre Phil est dans une ligue à part à la course à pied et je n'ai aucune ambition d'aller le rattraper!

Tout souriant pour le début de la course à pied.


Au turn-around après 10km, je consulte ma montre véritablement pour la première fois et je constate que ça m'a pris 55 minutes pour les 10 premiers km. Je me dis que je peux maintenant accélérer pour courir 30 secondes plus vite le kilomètre, surtout que mes jambes vont super bien et que je n'ai pas mal nulle part.

Oups...c'est là que tout change: je passe d'un gars euphorique et gonflé à bloc à un gars qui réalise qu'avec ses 2 barres de protéines prises depuis le début, je n'ai plus d'énergie pour accélérer. J'essaie fréquemment d'accélérer, je prends plus de liquides aux ravitaillements, je m'y arrête même et je me verse de l'eau sur la tête mais rien n'y fait, c'est trop tard. J'accepte finalement mon sort, que je ne pourrai compléter rapidement ce marathon et je me dis qu'au moins j'ai beaucoup de plaisir, aucune douleur et que je profiterai de cette expérience, sans savoir le temps que ça me prendra, et ça devient d'ailleurs rapidement secondaire. Je ne consulte presque plus ma montre pour le reste de la journée. Je suis relativement constant tout de même et je suis super motivé à l'approche de la fin de la première boucle lorsque je peux courir avec Julie à mes côtés pour 30 secondes. Mes pulsations cardiaques sont super basses (autour de 140) et je peux lui raconter que j'ai du fun mais que je n'ai plus de jus pour aller plus vite. Elle m'encourage et me prévient qu'une surprise m'attend au prochain tournant:

J'ai tellement ri en voyant mon beau-père et beau-frère déguisés en collégiennes de Boston!


Je passe ensuite au ravitaillement des Chickens et je suis heureux de les retrouver et qu'ils me fassent sentir comme un héros! Je me gave d'oranges à leur station (ma découverte du jour!) et je suis heureux de voir qu'au moins j'ai encore du kick pour les côtes, comme quoi s'entraîner sur le Mont-Royal et sur Pie 9, c'est payant! Je croise d'autres supporteurs et j'entre dans le village pour la fin de la première boucle.

La p'tite pluie a fait du bien sur la course à pied.


L'ambiance est incroyable dans le village et au moment où je tourne à droite pour entamer ma deuxième boucle (la ligne d'arrivée est à 100 mètres à ma gauche), je suis heureux de mes pensées car au lieu de me dire que j'ai hâte de franchir la ligne d'arrivée, je suis heureux d'avoir une deuxième boucle à compléter!

J'entame cette deuxième boucle et je suis tellement concentré sur chaque partie de la course que lorsque mes amis me disent ''C'est presque fini!'', je ris tellement ça me semble la meilleure blague de la journée! Je comprends que de leur point de vue, un demi-marathon sur un Ironman, c'est peu, mais je suis tellement au présent que ça me semble encore bien loin. Je jette un oeil à ma montre et je constate que ça m'a pris 1h55 pour la première boucle...ce sera difficile de maintenir la même vitesse et d'entrer sous les 11h mais ça me laisse plutôt indifférent comme je ne peux rien y faire de toute façon.

Les 10 km suivants sont sans histoire, sinon que je croise à nouveau Phil la comète, Benoît qui est super focus et Coin Coin qui me regarde en haussant les épaules, en ne comprennant pas pourquoi je ne l'ai pas encore rattrapé. Arrivé au turn-around, je suis maintenant à 10km de la fin et je ne prends même pas la peine de regarder ma montre. Je m'arrête maintenant à presque toutes les stations pour me ravitailler, profitant également des bouillons de poulet servis en raison d'une légère pluie rafraîchissante et je remercie les bénévoles. Ils sont incroyables, à sauter partout et nous encourager bruyamment. À environ 5km de la fin, je commence à me sentir étourdi, victime d'hypoglycémie (j'en fais régulièrement et ça ne me stresse pas particulièrement). J'ai quand même hâte au prochain ravitaillement et lorsque je m'y arrête, je prends absolument tout: 2 verres d'eau, 2 verres de Perform, 2 verres de Coke (une première car je n'ai rien à perdre!), plein de quartiers d'orange et une poignée de jujubes! Ce rush de sucres me fait le plus grand bien et je me dirige avec impatience vers la ligne d'arrivée. Je croise Hélène, Seb et Phil le pirate et je me mets à espérer qu'ils me rattrapent d'ici la fin pour qu'on termine ça plusieurs Chickens en même temps!

Alors que je passe une dernière fois au ravitaillement des Chickens, on me tend Poupou, notre mascotte en plastique. J'hésite une seconde et je prends Poupou pour courir avec celui-ci jusqu'à la ligne d'arrivée, une tradition dans notre club. Tant qu'à courir pour le fun, ce ne sera pas grave si je cours moins vite le dernier kilomètre restant et ce sera sympa pour la photo finale!

Avec Poupou, en route vers la ligne d'arrivée.


Surprise! En courant avec Poupou que je brandis régulièrement dans les airs, la foule m'applaudit comme si j'étais une vedette de rock et ça me donne des ailes! Je me retrouve à sprinter le dernier kilomètre sous les applaudissements déchaînés de la foule! À 100 mètres de l'arrivée, juste au moment où j'aperçois Julie dans la foule, je vois Kevin juste devant moi. Kevin a fait son marathon en alternant la course et la marche et comme je ne connaissais pas sa technique, je croyais à chaque fois qu'il était en train de casser et je l'encourageais. Il m'a probablement dépassé dans une pause-pipi. Je sprinte à sa hauteur, lui tape sur l'épaule et lui dit qu'on va finir ça ensemble, un à côté de l'autre sur la ligne d'arrivée. C'est ce qu'on fait et je pense que c'est une des plus belles photos de la ligne d'arrivée de cette journée!




Moment magique en compagnie de Kevin et Poupou!


18h14: 2 bénévoles viennent me voir pour me remettre ma médaille, une bouteille d'eau et s'assurer que je suis correct. On m'offre de passer au buffet (pizza, poutine et bière au menu entre autres!) mais je me contente d'un 6 pouces de Subway avec un lait au chocolat. J'aperçois mes supporteurs de l'autre côté des barrières et je vais les retrouver rapidement. Je n'ai jamais terminé une course aussi en forme et d'aussi bonne humeur, comme quoi il y a des avantages à ne pas être capable de pousser! On s'abrite une demi-heure sous une tente alors qu'un déluge s'abat et je raconte ma journée à mes supporteurs, super touché de les voir présents avec moi.

L'homme de fer et sa fan numéro 1!


Mon résultat final sera de 11h14. Je suis un peu déçu de ne pas avoir eu assez d'énergie pour courir plus rapidement mon marathon mais je suis quand même heureux de ma journée. J'ai réalisé que le plus difficile n'était pas de faire un Ironman mais plutôt l'entraînement pour s'y rendre et que le bonheur ou la joie ne se calcule pas uniquement en résultat de temps au chrono final.

La tradition pour les athlètes au Ironman est de retourner voir les derniers compléter l'épreuve juste avant minuit...voici un aperçu de l'ambiance survoltée lors de l'arrivée d'une des dernières participantes:



J'ai remercié plusieurs personnes et club dans ce compte-rendu, et je vous remercie tous à nouveau pour vos pensées pour moi en cette journée, mais je ne pourrai jamais assez remercier Julie pour son incroyable support du début à la fin. Je me souviendrai toujours du lendemain d'une conversation où j'hésitais (un peu) à m'inscrire pour le Ironman où elle s'est réveillée en me disant qu'elle avait pensé à ça. Au lieu de me dire que c'était mauvais pour la santé ou dangereux pour les blessures ou que nous n'aurions pas de temps de qualité de couple, elle m'a plutôt dit que je devrais m'inscrire car si je ne le faisais pas, je risquerais de le regretter par la suite. Et 3 semaines après le Ironman, c'est elle qui a senti que j'avais besoin de le refaire à nouveau l'an prochain pour prendre ma revenge sur la course à pied et qui m'a à nouveau soutenue dans cette décision. Quelques jours plus tard, Julie s'est également inscrire au Ironman et nous aurons la chance de prendre le départ pour la natation main dans la main!

Je ne pourrai jamais te remercier assez Julie; tu as fait plus que ta part cet été pour me permettre de suivre mon plan d'entraînement, tu as été présente à toutes mes compétitions importantes depuis qu'on se connaît et tu as fait de la journée précédent le Ironman une des plus belles journées de ma vie en acceptant ma demande en mariage.

Et ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants...

La veille du Ironman, après la grande demande, avec mon bracelet d'athlète et surtout la bague de fiancée de Julie!






mardi 17 avril 2012

Dans la tête d'un coureur à Boston

Boston is all in.



C'était cette année le slogan du plus vieux marathon couru à chaque année au monde, qui en était à sa 116e édition consécutive en 2012. Décrit comme le St-Graal des coureurs, la renommée du marathon de Boston tient en grande partie à son système de qualification. À quelques exceptions près avec des oeuvres de bienfaisance, tous les coureurs doivent d'abord se qualifier en courant un marathon dans un temps déterminé en fonction de leur groupe d'âge et de leur sexe. C'était mon rêve de jeune coureur de me qualifier pour ce marathon et de pouvoir y participer.

Que ce soit avec des affiches annonçant le marathon partout dans la ville, avec les publicités spécifiques des compagnies de sport pour le marathon de Boston, à l'expo-marathon grandiose avec les affiches géantes du coureur ayant remporté le marathon le plus rapide de l'histoire à Boston l'année précédente, lors du souper de pâtes officiel la veille de l'événement à l'hôtel de ville ou simplement en marchant dans les rues et en croisant les 27 000 coureurs du marathon portant le sac du marathon ou du linge de celui-ci, sans oublier la bière de Sam's Adams brassée spécialement pour ce marathon (la 26.2, nombre de milles d'un marathon...et excellente bière en passant!), partout où nous allions, Boston était effectivement all in.








Souper de pâtes la veille du marathon...c'est Julie qui terminera ma bière par contre!


Après une traditionnelle nuit précédent un tel événement au cours de laquelle on se réveille à toutes les quelques heures en étant certain qu'il est déjà 6h, je quitte mon hôtel vers 6h30 pour aller prendre l'autobus qui nous amènera au départ du marathon, à 42,2 km de Boston. Une fois sur place, ma vague de départ est annoncée et nous devons marcher environ 10 minutes pour se rendre à celui-ci. Il était alors près de 10h et le mercure indiquait déjà 24 degrés, avec 32 degrés prévus au cours de la journée. Sur les 27 000 coureurs, 4 000 s'étaient déjà désisté en raison de cette canicule inhabituelle (les températures moyennes à Boston sont de 8 degrés au départ et 13 degrés dans la journée!). En nous voyant marcher sous ce soleil de plomb vers la ligne de départ et avec le bruit d'un hélicoptère des médias au-dessus de nos têtes, j'avais l'impression que nous nous dirigions vers un camp de concentration.

Dans la file le matin pour prendre les autobus nous transportant au départ.


Je suis quand même confiant avec mes bas de compression qui diminuent les possibilités des crampes dans les mollets, mes suppléments de magnésium pris au cours des 3 dernières semaines et ma ceinture avec mes bouteilles d'eau que j'apporte avec moi malgré des ravitaillements en eau à tous les miles (1,6 km).

Le départ est donné, je franchis la ligne 6 minutes après le départ (nous sommes 9 000 coureurs dans ma vague!) et j'entends à peine la première chanson sur mon iPod (Where the streets have no name de U2) en raison des cris d'encouragement de la foule. La première pancarte d'un spectateur que je lis en courant m'indique que tout est possible avec Dieu à mes côtés...c'est bon à savoir!

La raison expliquant que le parcours du marathon de Boston est aussi difficile est fort simple: 5km de descentes en débutant suivi de 20km de faux plats montants et descendants, les fameuses côtes de Boston (surtout la Heartbreak Hill) entre les km 25 et 34 et 8km de descentes et de plat pour terminer.

J'y vais donc conservateur pour les premiers 25km avec un choix de musique plus lent et un rythme retenu. Tout va très bien, je cours à ma vitesse prévue sans vraiment pousser mais je constate tout de même qu'avec cette chaleur, mes pulsations cardiaques sont à 90% de mon maximum déjà, tournant autour de 170. Je décide rapidement après 3 miles que je dois réduire ma température corporelle si je veux terminer ce marathon. Je prends plus le temps de boire mon eau et Gatorade en courant lors des stations et surtout, je m'asperge d'un verre d'eau sur la tête, un dans le cou/dos et un sur la poitrine. La stratégie fonctionne et me permet de courir facilement les 20 premiers kilomètres dans mes temps espérés, en conservant de l'énergie. Malheureusement, mes pulsations cardiaques se maintiennent élevées mais je me sens bien et je demeure constant.

À l'approche du 20ekm, les foules se font de plus en plus nombreuses et le support que nous avons est incroyable. En tout, c'est 500 000 spectateurs qui nous encouragent en cette journée fériée aux États-Unis et j'ai l'impression qu'ils nous encouragent encore plus fort en raison de la canicule. Je tape dans les mains de nombreuses personnes et m'amuse à lire en courant les nombreuses pancartes. Comme plusieurs autres coureurs, je pointe les personnes avec des tuyaux d'arrosage pour qu'elles m'aspergent d'eau lorsque je passe devant elles et les kilomètres se passent dans cette ambiance de grande fête.

J'arrive alors à une légendes du marathon de Boston: les fameuses étudiantes du Wellesley College qui crient comme si nous étions les Beatles dans les années 60 et qui ont des pancartes nous demandant de les embrasser. J'avais parlé avec ma blonde Julie de ces fameuses étudiantes que plusieurs coureurs vont embrasseur sur la joue avant de poursuivre leur marathon. Même si Julie me disait d'aller les embrasser si ça pouvait m'aider dans ma course, je vous jure que ce n'était pas dans mon plan de match! Cependant, je les ai trouvé vraiment drôles avec leurs pancartes du genre Kiss me I won't tell your husband, Never been kissed ou Kiss me Je suis Française (de Paris) que je me suis dit: Je cours le marathon de Boston, ce sera peut-être ma seule fois à vie, autant le vivre totalement. J'ai donc ralenti très légèrement pour aller embrasser une blonde (quelle surprise!) mais je suis arrivé tellement rapidement que pendant qu'elle tournait sa joue pour que je l'embrasse, je me suis plutôt retrouvé à l'embrasser directement sur la bouche! Et d'entendre son amie dire très fort OH MY GODDDDDDD!!!!!

Est-ce qu'embrasser ces étudiantes porte plutôt malchance? Je ne sais pas mais tout ce que je sais c'est que juste après avoir franchi la barre du demi-marathon dans mes objectifs de temps prévu (1h36), c'est comme si j'avais frappé un immense mur à tous les niveaux: dans mes jambes, dans mon coeur et dans ma tête.

Les 5km suivants, alors qu'ils n'étaient pourtant pas des kilomètres difficiles au point de vue technique, furent les plus difficiles de ma vie. Je n'avais pas vraiment mal aux jambes mais on dirait qu'elles ne voulaient plus avancer, mon coeur ne voulait plus dépasser 160 pulsations cardiaques et ma tête, surtout ma tête, n'avait pas envie de courir et souffrir pendant un autre 21km sous cette chaleur. La chanson Sexy and I know it de LMFAO jouait sur mon iPod et je trouvais ça tellement ridicule alors que je ne me sentais pas sexy du tout avec ma camisole dézippée jusqu'au nombril, trempé d'eau et de sueur et avec de la difficulté à courir. J'ai décidé pour ma première fois à vie d'arrêter ma musique qui m'agressait car trop rapide pour le rythme que je pouvais maintenir.

J'ai vraiment eu envie d'abandonner. De m'arrêter là et de simuler une blessure pour qu'une ambulance m'amène à la ligne d'arrivée rejoindre ma blonde. J'ai regardé ma montre, l'heure, le nombre de kilomètres restants et surtout les côtes à venir et je me disais que je ne pourrais jamais courir encore 2h sous cette chaleur. J'ai continué de courir et je me suis parlé énormément. Je me suis rappelé que c'était mon rêve de courir ce marathon, que je m'étais en quelque sorte entraîné depuis que je cours il y a 2 ans pour réaliser ce rêve, que si je voulais un parcours rapide et facile ce n'était pas ici que je devrais être, que je voulais relever ce Défi. J'ai pensé à tous ceux d'entre vous qui m'aviez encouragé, à tous ceux à qui j'avais demandé de l'énergie vers midi quand j'arriverais aux fameuses côtes du marathon. Et quelques jours plus tôt, je m'étais dit que j'allais courir ce marathon entre autres pour une personne près de moi qui vient d'apprendre que son mari qui célèbre ses 50 ans cette semaine vient de se faire découvrir 2 tumeurs cancéreuses au cerveau.

Je venais de me convaincre que j'allais terminer ce marathon. Je savais que ce serait long, interminable, mais je venais de me convaincre de le terminer. À ce moment précis, alors que tout le monde me dépasse depuis quelques minutes déjà, je rattrape une personne du groupe des handicapés (ils sont partis avant nous) qui court avec une jambe artificielle recourbée. J''étais super ému et je me suis dit que si ce gars-là peut courir le marathon de Boston, j'allais le faire moi aussi. Je me suis également dit que j'allais appliquer ma seule devise que j'ai toujours eu lors d'un marathon: NE JAMAIS MARCHER.

Avec ce nouvel état d'esprit, j'ai poursuivi ma course, j'ai profité comme jamais de l'énergie de la foule, j'ai même tapé dans les mains d'un gars qui avait un chandail des Bruins de Boston (...), j'ai mangé ma demi barre de protéines que j'avais avec moi en cas d'urgence, j'ai commencé à manger des quartiers d'orange que les enfants donnaient, à manger des réglisses, bref à tout essayer en me disant que je n'avais rien à perdre et que je devais y aller miles par miles. J'ai pratiquement cessé de regarder ma montre (après avoir constaté que midi approchait) et j'ai seulement souhaité affronter ces fameuses côtes qui me terrorisaient quelques minutes plus tôt.

Petit à petit, alors que tout le monde me dépassait depuis les derniers kilomètres, j'approchais des fameuses côtes et je réalisais que je commençais à dépasser des personnes avec lesquelles j'avais couru précédemment. De plus en plus de coureurs commençaient à marcher, de nombreux autres avaient des crampes et devaient s'arrêter régulièrement alors que d'autres optaient pour alterner la marche avec la course. J'ai poursuivi mon chemin de croix et à ma surprise, lorsqu'un supporteur m'a crié Looking good!, je suis parti à rire tellement je trouvais que son commentaire devait être sarcastique. J'ai réalisé à cet instant que j'avais à nouveau du plaisir à courir ce marathon. Un peu plus tard, j'ai demandé à un supporteur où était cette fameuse côte surnommée Heartbreak Hill, la côte la plus redoutée du marathon. Celui-ci me répondit que je l'avais déjà franchi!!! Je n'en revenais pas...ça confirme ce qu'on m'avait dit; ce n'est pas les montées qui sont difficiles à Boston mais les descentes du début qui détruisent les jambes.

Les 7 kilomètres suivants se passent relativement bien, malgré un début de crampe qui me guette dans la jambe droite, avec une pente généralement descendante, et à l'approche du dernier kilomètre, je reconnais enfin le signe d'une station-service près de Fenway Park (je ne pensais jamais que voir une station-service lors d'un marathon me ferait cet effet!) et je reconnais une dernière côte qui nous fera sortir juste avant la rue principale de Boston, Bolyston Street. Plusieurs coureurs cessent de courir et commencent à marcher rendu à cette petite côte, aussi miniscule soit-elle (au total, 1 000 personnes abandonneront en cours de route, incluant l'homme qui a couru le marathon le plus rapide de l'histoire l'an dernier, victime de crampes au 30e km). Je la franchis, tourne le coin de la rue et appercoit Bolyston Street. Je lève les bras dans les airs en signe de victoire à venir et m'engage sur Bolyson Street pour les 600 derniers mètres. Moi qui adore sprinter pour terminer une course, je devrai me contenter de garder le rythme et de voir quelques coureurs me dépasser dans leur sprint. Après un long moment à mes yeux, je franchis enfin le fil d'arrivée alors qu'il fait maintenant 32 degrés, faisant le V de la victoire de mes deux bras. J'ai réussi. J'ai accompli mon rêve. Ce fut beaucoup plus difficile que prévu, je suis complètement brûlé mentalement mais je l'aurai fait.

Je peux enfin MARCHER et la première bouteille d'eau qu'on me tend se retrouve au complet versé sur moi avant de boire la suivante. Je continue ma marche vers la sortie du périmètre et me penche enfin pour qu'on me dépose la médaille autour du cou. J'ai les larmes aux yeux lors de ce moment et j'embrasse la médaille. Je traverse les ravitaillements pour retrouver Julie et à voir mon temps d'arrivée (3h35), mon visage et entendre ma voix faible, elle comprend tout. On a les larmes aux yeux et nous rentrons tranquillement à notre hôtel.



Merci à tous ceux qui m'ont encouragé, vous avez fait une plus grande différence que vous le pensez, et j'espère pouvoir compter sur vos encouragements et votre présence en personne pour le Ironman de Tremblant le 19 août prochain.

Philippe

Mon fameux gâteau au fromage du Cheesecake Factory dégusté à une halte dans les White Mountains sur le retour!!!